Maroc–Espagne : un pont de vie à bâtir grâce au don d’organes et de tissus humains
Par Dr Anwar CHERKAOUI avec le concours du Pr Mohsine EL BAKKALI, auteur d’un livre sur le développement de la greffe de la cornée au Maroc
Le Maroc, l’Espagne et le Portugal vont organiser ensemble la coupe du monde de football en 2030.
Une occasion en Or pour le Maroc de développer un programme national de don et de greffes d’organes et de tissus. Explications
L’Espagne, championne mondiale du don et de la greffe d’organes
L’Espagne n’est pas seulement voisine et partenaire footballistique du Maroc dans l’organisation de la Coupe du monde 2030.
Elle est aussi le pays qui a su bâtir, depuis trois décennies, le modèle le plus performant de don et de greffe d’organes au monde.
Avec plus de 40 donneurs par million d’habitants, l’Organisation nationale de transplantation (ONT) espagnole est devenue une référence mondiale. Sa réussite repose sur une organisation hospitalière millimétrée, une coordination permanente entre services, et une véritable culture sociétale du don.
Le Maroc, en quête d’un modèle
Au Maroc, malgré une législation existante, le don d’organes reste marginal.
Les listes d’attente s’allongent, les malades dialysés souffrent, et les greffes de rein, de foie, de cœur ou de cornée se comptent encore en dizaines par an, alors qu’elles devraient se chiffrer en centaines, voir en milliers.
Le pays dispose pourtant d’un vivier de compétences médicales, d’hôpitaux universitaires dynamiques, et d’un cadre religieux favorable puisque plusieurs avis de jurisconsultes ont rappelé que le don post-mortem est un acte de solidarité conforme à l’éthique musulmane.
Pourquoi s’inspirer du modèle espagnol ?
1. Sur le plan scientifique, l’Espagne a développé des protocoles de détection et d’optimisation des donneurs en réanimation, ainsi que des techniques modernes de préservation des organes (machines de perfusion).
Ces pratiques permettent de sauver des greffons qui seraient perdus ailleurs.
2. Sur le plan économique, chaque greffe rénale réalisée équivaut à des années de dialyse évitées, avec un gain majeur pour le système de santé et une réduction des coûts indirects liés à la perte de productivité des patients.
3. Sur le plan social, l’Espagne a su faire du don d’organes une norme culturelle et citoyenne.
Les familles endeuillées trouvent un sens dans l’acte de don.
C’est cette culture qu’il faut implanter au Maroc à travers des campagnes nationales, impliquant imams, enseignants, journalistes, sportifs et influenceurs
Un partenariat stratégique Maroc–Espagne–Portugal
La Coupe du monde 2030, co-organisée par Rabat, Madrid et Lisbonne, ne doit pas être seulement un événement sportif.
Elle peut devenir un tremplin pour lancer un vaste programme de coopération dans le domaine du don et de la greffe d’organes et de tissus
Des formations croisées pour les coordinateurs hospitaliers marocains dans les hôpitaux espagnols.
La création d’une Agence marocaine du don et de la greffe d’organes et de tissus
Des projets de recherche communs sur la préservation des organes et l’immunologie.
Une campagne symbolique : « Coupe du monde, coupe de vie » — un cœur, un rein ou une cornée pour unir deux continents.
Appel aux autorités marocaines
Il est temps que le Maroc fasse de la greffe une priorité nationale de santé publique.
L’État marocain doit :
créer une coordination centrale et régionale pour le don et la greffe d’organes et de tissus
financer la logistique de prélèvement et de transport des organes et des tissus prélevés
développer des banques de tissus modernes,
et surtout, instaurer la transparence et la confiance grâce à un registre national clair des malades qui ont besoin de greffes.
Le Royaume du Maroc a déjà prouvé sa capacité à bâtir de grands projets structurants : ports, TGV, énergies renouvelables.
Le don d’organes doit devenir l’un de ces projets de société.
Car derrière chaque greffe, il y a une vie sauvée, une vue retrouvée, une famille préservée, et un citoyen qui retrouve sa dignité.
Mots-clés: Coopération, Football, Greffes d’organes
