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Un serment à réécrire : Plaidoyer pour plus d’éthique en néphrologie

Par Dr Anwar CHERKAOUI

Il est très difficile d’être médecin et de parler ou d’écrire sur l’éthique médicale.
La Société Marocaine de Néphrologie a osé franchir le pas.
Une importante conférence sur l’éthique en néphrologie a marqué les esprits des congressistes lors du 21e Congrès National de Néphrologie, qui se tient à Marrakech du 8 au 10 mai 2025.

Tous et toutes y ont adhéré.

On appelle même à la création d’un comité d’éthique en néphrologie.

Ce texte est inspiré de cette conférence, qui a montré qu’il est urgent d’agir pour sauvegarder l’image de la néphrologie marocaine.

Ce cri du cœur exprime le vœu sincère et profond de tous les néphrologues présents.

Sous les néons blafards d’une salle de dialyse, le temps semble parfois suspendu.

Là, gisent des vies reliées à des machines, comme on s’accroche à une rive quand la mer est déchaînée.

Trois fois par semaine, pendant des heures, le même rituel s’installe : un patient, une aiguille, un flux vital.

Mais derrière cette mécanique médicale se joue un théâtre plus silencieux, plus profond, où la morale, la souffrance, la patience et la vérité humaine s’entrelacent.

Le néphrologue, lui, entre dans cette scène comme un veilleur de nuit.

Il ne soigne pas seulement des reins défaillants : il veille sur des âmes.

Il apprend les silences, déchiffre les regards, comprend les colères tues et les fatigues dissimulées.

Le patient, quant à lui, ne vient pas simplement pour une perfusion de vie.

Il vient livrer son intimité, ses espoirs, ses craintes, et parfois sa colère.

Car qui peut accepter sans heurt de dépendre d’une machine pour vivre, d’un autre pour survivre ?

Une relation particulière, tissée de nécessité et de familiarité

Le lien entre néphrologue et malade sous dialyse est unique.
Il est basé sur la répétition, la dépendance, le regard médical quotidien, l’épreuve constante.

Cette proximité, qui devrait être le socle d’un soin profondément humain, peut aussi devenir une faille.

Quand le médecin devient indifférent, quand il voit dans le patient un simple matricule branché à une pompe, l’éthique vacille.

Quand le malade, épuisé, exige avec agressivité, ou tente de manipuler pour obtenir un traitement, un horaire ou un avantage, la confiance se fissure.

Et pourtant, les deux sont pris dans la même nasse :
l’un guette les œdèmes, les pics de potassium, les accès d’hypertension ;
l’autre endure la fatigue chronique, les restrictions alimentaires, l’injustice d’un corps devenu hostile.

Les failles de l’éthique, ces ombres de la routine

L’éthique chancelle quand l’habitude tue l’empathie.

Elle s’efface quand la souffrance du patient est banalisée, quand ses plaintes deviennent un bruit de fond.

Elle s’effondre aussi quand le patient oublie que le médecin est un humain, faillible, parfois épuisé lui aussi.

Elle est bafouée lorsque le médecin cède à la tentation de la toute-puissance — ou à d’autres tentations.

Ou lorsque le malade oublie que le respect doit être réciproque, même dans la douleur.

Quels garde-fous pour préserver l’éthique ?

Il faut d’abord rééduquer le cœur du médecin,
et mieux sensibiliser les patients à la dureté du métier de néphrologue.

Rappeler au médecin que chaque patient est un monde, que chaque séance est une offrande de confiance.

Offrir au néphrologue des espaces de parole, de soutien, de formation continue sur l’éthique, le respect, l’usure compassionnelle.

Ensuite, instaurer des chartes éthiques claires, signées par les deux parties.

Créer des cercles d’écoute dans les centres de dialyse, où patients et soignants peuvent exprimer les tensions, poser des mots sur les malentendus.

Enfin, rappeler à chacun que, dans cette relation étrange entre un soignant et un insuffisant rénal chronique, il n’y a ni maître, ni sujet.
Il y a deux êtres humains, naufragés du sort, contraints de naviguer ensemble sur la mer de la maladie.

Renforcer l’éthique en néphrologie, ce n’est pas inventer de nouvelles lois.

C’est remettre l’humain au centre, réapprendre la patience et la gratitude,
instituer des gestes de respect comme des rituels sacrés.

C’est admettre que parfois, la fatigue peut faire chanceler, mais que c’est justement dans ces instants-là que l’éthique doit être un phare.

Mots-clés: Congrès, Néphrologie, Plaidoyer


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