Cancer chez un enfant : Quels soutiens psychologiques pour le patient et sa famille
Par Dr Hachem TYAL
Médecin psychiatre et psychanalyste
Dans le cadre des activités de sensibilisation aux cancers de l’enfant ( Septembre en Or), le site médical du 21 siècle, sante21, présente une contribution d'un psychiatre, psychanalytique et directeur de la clinique Villa des lilas à Casablanca.
Le cancer oblige l’enfant à des traitements particulièrement éprouvants, qui le confrontent à des expériences extrêmement difficiles, souvent insupportables, expériences dans lesquelles la mort est toujours présente.
Cela entraine chez l’enfant, chez ses parents ainsi que chez ses soignants de multiples interrogations dont la prise en compte est indissociable de la réussite d’un projet de soins.
Les traitements associent souvent la chimiothérapie, la radiothérapie et la chirurgie, et leur durée est souvent de plusieurs mois avec une surveillance rapprochée sur plusieurs années.
C’est la raison pour laquelle le cancer est toujours une épreuve grave pour l’enfant mais aussi pour sa famille, et oblige à un accompagnement par des équipes soignantes de grandes compétences médico-infirmières et aussi humaines.
Le cancer, quand il s’introduit dans la vie de l’enfant, constitue ainsi une expérience subjective majeure pour lui ainsi que pour ses parents et sa fratrie. Il est ainsi à l’origine d’une discontinuité dans sa vie le poussant à se poser des questions qui souvent le dépassent comme des questions sur le sens de sa maladie et de sa vie : « Pourquoi, pourquoi moi, pourquoi ma famille, pourquoi en ce moment ? »
Cette expérience, si elle n’est pas prise en charge très rapidement, risque d’être à l’origine de traumatismes psychologiques pouvant même se transmettre à la génération suivante.
C’est dire à quel point il est essentiel d’être attentif à soutenir l’enfant et sa famille pendant le temps du traitement et aussi après mais aussi de penser à leur devenir dans une préoccupation de prévention de séquelles éventuelles.
Le cancer se vit chez l’enfant dans son corps, donc dans sa réalité physique, mais aussi dans l’image consciente et inconsciente qu’il en a. Le cancer se vit aussi dans le sentiment de confiance de l’enfant en ses capacités, dans son sentiment d’identité qu’il vie à travers son propre regard mais aussi celui des autres sur son corps affecté par la maladie.
L’enfant se pose aussi des questions sur sa place dans l’histoire de ses parents et de sa famille, dans leur désir. Il essaye de trouver une logique dans ce qui lui arrive, de comprendre la notion de fatalité, de trouver des explications à ce qui lui arrive.
Le cancer et sa prise en charge ont également une incidence grave sur le fonctionnement d’ensemble de la famille, remettant en question la place de chacun de ses membres, perturbant les uns et les autres dans leurs repères propres aussi bien sur le plan de leurs références idéologiques, que religieuses, culturelles. Ceci sans oublier les conséquences financières et professionnels dont il peut être à l’origine dans la famille.
La vie scolaire de l’enfant est également grandement affectée de même que sa relation aux autres élèves est perturbée. Il lui est souvent très difficile d’expliquer sa maladie et son vécu de celle-ci, de répondre aux questions de ses camarades de classe, de se confronter à leur regard, à leurs attitudes. Il se pose la question de savoir si sa place est toujours préservée parmi eux, et plus largement dans la société.
La question de la mort est toujours présente chez celui-ci. Il s’interroge sur les modalités d’une fin de vie, s’il restera présent dans l’esprit de ses parents après sa mort ou s’il sera remplacé par exemple.
Cest dire à quel point l’expérience traversée par un enfant traité pour un cancer est particulièrement complexe et dangereuse. Elle se doit d’être bien comprise, et soutenue, en s’intéressant aussi bien à l’enfant qu’ à sa famille, à ses soignants et à la société dans laquelle elle se déroule. Cela nécessite donc la collaboration des pédiatres oncologues, des psycho-oncologues et des psychanalystes et des diverses disciplines des sciences humaines et sociales.
Mots-clés: Contre le cancer, Pédiatrie, Psychiatrie