header
  • Accueil
  • Editorial
  • Entretien avec Dr Samir ZTOT, Médecin spécialiste en cardiologie interventionnelle, Président du 23ème Congrès National de Cardiologie

Entretien avec Dr Samir ZTOT, Médecin spécialiste en cardiologie interventionnelle, Président du 23ème Congrès National de Cardiologie

Attaque cardiaque aigue : la vie se joue dans les deux (2) premières heures après la crise

Entretien réalisé par Dr Anwar CHERKAOUI

Les premiers résultats d’une enquête nationale sur la situation de l’infarctus du myocarde au Maroc, ont été présenté par Dr Samir ZTOT, président du congrès national de cardiologie, qui s’est déroulé à Marrakech, les 19 et 20 octobre 2018. Pour en savoir plus sur cette urgence cardiaque absolue qu’est l’infarctus du myocarde, le site web de la médecine du 21ème siècle, www.sante21.ma, a réalisé cette interview avec Dr Samir ZTOT, président de la Société Marocaine de Cardiologie (SMC). Première recommandation : II est indispensable de connaître les signes d'alerte d’un infarctus du myocarde : douleur dans le thorax, fatigue, sueurs, vertiges, palpitations, nausées, vomissements...), afin que la prise en charge thérapeutique se fasse dans les premieres heures après la crise.

Question : Qu’est-ce qu’un Infarctus du Myocarde communément appelé Crise cardiaque ?

Dr Samir ZTOT : L'obstruction d'une artère qui alimente le cœur en sang, et donc en oxygène, entraîne la destruction partielle du muscle cardiaque.

L'Infarctus du myocarde est une urgence absolue, car il provoque des lésions irréversibles du tissu cardiaque. En effet, toutes les cellules de la zone qui n'est plus irriguée, à la suite de l'obstruction d'une artère coronaire par un caillot, voire d'un spasme, meurent rapidement, faute d'oxygénation. En fonction de sa taille, cette nécrose entraîne des problèmes de contraction du muscle cardiaque, se manifestent par des troubles du rythme, une insuffisance cardiaque, voire l'arrêt du cœur. La seule solution est de déboucher l'artère le plus rapidement possible après le début des symptômes, pour rétablir le passage du sang.

Le nombre d'infarctus du myocarde est de 120 000 par an en France. Environ 10 % des victimes décèdent dans l'heure qui suit et le taux de mortalité à un an est de 15 %. Le pronostic s'est néanmoins bien amélioré au cours des quinze dernières années : grâce aux progrès thérapeutiques, à la vitesse d'intervention des équipes médicales d’urgence et à la disponibilité d'unités de cardiologie interventionnelles, opérationnelles sept jours sur sept et vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la mortalité relative à trente jours a chuté de 68 %. Il faut savoir que le gain de survie est d'autant plus important que le rétablissement du flux sanguin du myocarde soit précoce et complet : la mortalité diminue de 50% pour un traitement lors de la première heure et de 30 % à la deuxième.

 Question : Quels sont les signes d’alerte qui doivent faire penser à une crise cardiaque ou infarctus du myocarde ?

 Il est donc indispensable de connaître les signes d'alerte : il s'agit d'une douleur aiguë et persistante en plein milieu du thorax (derrière le sternum), qui produit une sensation angoissante de serrement « comme dans un étau », d'oppression qui dure. Elle peut irradier dans le bras gauche, le dos et la mâchoire. Le patient peut ressentir une fatigue intense, des sueurs, des palpitations, des vertiges, des nausées et des vomissements. Néanmoins, certains infarctus ne donnent pas ces signes. Ils peuvent même être totalement « silencieux » et découverts a posteriori, lors de la survenue d'une complication.

 Devant un des symptômes précédemment décrits, il faut immédiatement consulter un cardiologue. Un électrocardiogramme est effectué pour confirmer ou non le diagnostic. Si le diagnostic se confirme, le patient sera dirigé vers une unité de cardiologie interventionnelle dans les plus brefs délais. Si le temps écoulé entre le début des symptômes et l'hospitalisation risque de dépasser quatre-vingt-dix minutes (90 mn), le patient recevra l'injection d'un agent « thrombolytique », capable de dissoudre le caillot sanguin qui obstrue l'artère coronaire.

Si ce délai de quatre-vingt-dix minutes peut être respecté, le patient bénéficiera directement d'une angioplastie dans l'unité de cardiologie. Un traitement médicamenteux complémentaire est administré pour limiter le risque de complications : la trinitrine (dérivé nitré), pour augmenter le débit artériel ; un bêtabloquant, pour réduire le risque de mort subite ; un antiagrégant plaquettaire, pour maintenir la perméabilité vasculaire. Sont également utilisés l'héparine (anticoagulant), les statines (qui visent à diminuer le taux sanguin de cholestérol) ou encore des inhibiteurs de l'enzyme de conversion (prescrits dans le traitement de l'hypertension artérielle).

 Question : Quelles sont les principales conséquences d’un infarctus du myocarde ?

 Dr Samir ZTOT : Les conséquences d'un tel accident sont liées à l'étendue de la zone asphyxiée et à la rapidité de la prise en charge. Pour les évaluer, les médecins réalisent différents examens : un électrocardiogramme, pour détecter des troubles du rythme, une échographie et un Doppler pour visualiser le cœur et la circulation, une coronarographie pour observer les artères coronaires, une épreuve d'effort pour vérifier les capacités cardiaques.

Question : Que conseillez-vous à un patient qui vient d’être victime d’un infarctus du myocarde ?

 Dr Samir ZTOT : A sa sortie de l'hôpital, le patient doit suivre une réadaptation cardiovasculaire, afin de favoriser la récupération des capacités du muscle cardiaque. Le bénéfice est physique mais également psychologique, en facilitant la reprise d'une activité professionnelle. L'année qui suit est marquée par une surveillance médicale régulière. Puis, si tout va bien, les rendez-vous s'espacent. Lorsque des troubles du rythme cardiaque persistent malgré un traitement adapté, un pacemaker ou un défibrillateur cardiaque implantable peuvent être mis en place sous anesthésie locale. Par ailleurs, si plusieurs artères coronaires sont rétrécies ou bouchées, un pontage permet d'améliorer la circulation. Enfin, en cas d'insuffisance cardiaque grave, une greffe du cœur peut être envisagée.

 Question : Quelle est la différence entre une angine de poitrine et un infarctus du myocarde ?

 Dr Samir ZTOT ; Il ne faut pas négliger les douleurs thoraciques qui viennent ponctuer un effort important. Il peut s'agir d'une angine de poitrine, encore appelée «angor», et dont les conséquences peuvent être graves. Car ces manifestations, qui irradient parfois dans l'épaule, la mâchoire ou le dos, sont des signaux d'alarme envoyés par le cœur qui souffre d'un manque d'oxygène. Mais il y a bien pire ! A côté de cet angor dit « d'effort », qui disparaît rapidement avec ou sans prise de trinitrine (le traitement vasodilatateur systématiquement prescrit), il existe un angor dit « instable » qui se manifeste au repos et ne disparaît pas malgré la prise de ce médicament. Il correspond à une rupture de la plaque d'athérome formée le long des parois des artères et peut précéder un infarctus du myocarde. Dans ce cas, une prise en charge rapide s'impose.

 Question : Est-ce qu’on peut prédire un infarctus du myocarde ?

 Dr Samir ZTOT ; Alors que les mécanismes impliqués dans la formation des plaques d'athérome sont assez bien connus, les spécialistes ne savent pas encore pourquoi ces plaques finissent parfois par se rompre. «Identifier les causes de ces ruptures permettrait de mieux prévoir le risque d'infarctus du myocarde, et peut-être d'empêcher leur survenue», expliquent des chercheurs de l'Inserm en France. En pratique, la plaque d'athérome qui se détache va déchirer la paroi de l'artère. Le contact entre cette zone libérée et le sang circulant génère une cascade d'événements : activation des plaquettes, formation de caillots, production de substances qui créent une constriction de l'artère. Tout cela va aboutir à une occlusion totale ou partielle, temporaire ou permanente de la coronaire.

Les chercheurs suivent actuellement la piste de l'inflammation affectant la paroi artérielle et recherchent des biomarqueurs du risque d'infarctus. Ils étudient aussi l'immunologie de la plaque d'athérome. Il se pourrait que des auto-anticorps jouent un rôle dans la progression de la maladie et facilitent la rupture. D'autres équipes travaillent sur les cellules de la paroi artérielle desquamées, qui circulent dans le sang avant l'infarctus. L'objectif est de savoir si leur concentration pourrait servir de marqueur prédictif.

Mots-clés: Crise cardiaque, Congrès National de Cardiologie, Dr Samir ZTOT


Suivez-nous sur Facebook

Sante21.ma

La Santé au 21ème sciecle

L'actualité médicale et pharmaceutique au maroc.

Nos partenaires